J’ai souvent (et toi aussi, je pense) entendu deux discours opposés. D’un côté, ceux qui sont fiers de l’éducation qu’ils ont reçue, et qu’ils veulent reproduire avec leurs enfants. De l’autre, ceux qui n’admettent pas certaines valeurs ou attitudes de leurs parents, et qui veulent donc faire tout le contraire.

Pour aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais souhaité me baser sur l’éducation que j’ai eue, pour définir l’éducation que je donnerais à mes enfants (dans le même sens, ou allant contre). Pour moi, ce raisonnement est faussé, et pour plusieurs raisons, c’est parti.

L’éducation que chacun de nous a reçue fait partie d’une histoire, d’une situation familiale, d’une époque, qui ne sont pas les mêmes aujourd’hui.

L’éducation que nous avons eue n’est pas celle que l’on se donne. Il faut être réaliste : nous n’avons pas en mémoire toutes les situations où nos parents nous ont enseigné des choses, se sont occupés de nous, nous ont engueulé, nous ont laissés faire pour que nous apprenions de nos erreurs sans qu’on s’en aperçoive, et j’en passe ! Nous n’avons qu’une image plus ou moins biaisée de la façon dont nos parents nous ont construit, ou ont voulu le faire.

Enfin, notre éducation a eu à faire face à tout ce que l’on a été amené à vivre, aux situations que nous avons eue à affronter. Bref, à toutes nos expériences.

Où veux-je en venir ? Eh bien au fait que pour moi on ne doit pas penser l’éducation à transmettre selon ce que nous avons vécu. Mais uniquement se baser sur notre situation actuelle, sur notre personnalité, nos attentes, nos envies. Et l’ensemble de ces points chez notre moitié.

Alors, oui, nous sommes le résultat de ce que l’on nous a inculqué, mais aussi et surtout de notre vie, de nos expériences. Et si l’on voulait par exemple tenter de reproduire fidèlement la façon dont on a été élevé, le résultat serait forcément différent, car nos enfants ont leur personnalité, leur propre vécu.

Alors mon conseil est de suivre notre feeling. Certes, on pourra « réfléchir » sur certains points de l’éducation que l’on souhaite donner. Cela ira du niveau de politesse à l’hygiène, en passant par l’accès au numérique ou encore la sévérité. Mais aussi bien que l’on veuille faire et aussi précise que soit notre idée de l’éducation parfaite à transmettre, nous aurons toujours des surprises. Des adaptations à réaliser. Des remises en question.

Car, oui, ton enfant va te mettre des bâtons dans les trous. Volontairement d’une part, parce qu’il devra s’affirmer, chercher sa place, comprendre qui il est, apprendre à écouter et aussi à se rebeller. Involontairement également, car la rue lui apportera bien des éléments contraires à tes idéaux. J’inclue dans la rue la société en général, l’école, les copains, la famille, l’expérience du quotidien. Et tu ne pourras pas toujours appliquer tes préceptes pré-établis, voire même remettras-tu en question ta position sur certains points.

En ce sens, une chose intéressante selon moi est de faire une certaine introspection avant d’avoir des enfants. De réfléchir à sa vie, ses objectifs, ses envies…et bien sûr son éducation. Ou en tous cas, l’image que tu en as, si tu as suivi. Une fois cela fait, « intégrer » tout cela, accepter que tu ne comprends pas tout de la façon dont tes parents ont agi avec toi, et que tu ne le pourras jamais. Te remettre en cause, sur qui tu es aujourd’hui, qui tu as été, et qui tu voudrais être. En gros, faire un certain point sur ton passé, ton présent, et votre avenir.

Car oui, si le temps est un long fleuve tranquille, l’éducation ne l’est pas. Et à ne pas chercher à comprendre qui tu es, et comment ton passé (incluant ton éducation) influe encore sur ta façon d’être, tu reproduiras probablement des schémas antédiluviens. Pourquoi antédiluviens ? Déjà car je voulais placer ce mot sur le moment, ça fait classe. Mais surtout car il est probable, a priori, que ton éducation dans ses grandes lignes suive celle de tes parents, qui ont reproduit celle de leurs parents également, etc…L’idée est d’essayer (j’ai bien dis essayer, pas réussir forcément) de définir l’éducation à donner à tes enfants en mettant de côté ton éducation et ton vécu.

Oui, tu n’as pas envie que ton enfant soit ce petit blondinet qui était la tête de turc des autres dans la cour de récré, car ça c’était toi. Oui, tu ne veux pas que ton enfant soit le dernier à être pris dans l’équipe de foot/basket/volley, car tu l’as trop subi. Mais tu ne penses pas ainsi à ton enfant en premier, mais à ce que tu projettes sur lui de ta propre vie.

A mon sens, la meilleure éducation que l’on puisse donner c’est simplement d’essayer de rendre son enfant heureux. Et, dans cette optique, s’adapter. Crier si l’on estime qu’il y en a besoin (et non parce qu’on n’arrive pas à se retenir car on est énervé), faire un câlin quand on pense que c’est nécessaire (et même si notre enfant a fait une bêtise, car on est allé trop loin dans la punition, qu’on a trop crié, ou qu’on ressent chez lui une trop grande émotion qui lui est nocive,…), punir si on estime qu’il faut le faire pour le bon développement de notre enfant. Et punir ne veut pas forcément crier, voire taper, mais peut être simplement de mettre son enfant au coin, ou le priver d’un jouet.

En ce sens, cette idée rejoint ma vision de l’autorité : un parent qui crie ou qui doit hurler pour se faire obéir n’a pas d’autorité. Un parent qui doit réfléchir à la façon dont il a été éduqué pour savoir comment agir avec son enfant, n’éduque pas son enfant, ne s’adapte pas à ses besoins, il ne fait que reproduire un schéma.

Alors, avant de te demander si l’éducation que tu donnes à ton enfant est bonne, demande-toi si c’est bien l’éducation que TU veux lui donner, et non celle que tu as reçue que tu appliques.

Ainsi, le proverbe humoristique « avant j’avais des principes, maintenant je suis parent » prend tout son sens.

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5 Commentaires

  1. Article juste dont je partage la réflexion. Après c’est une très belle théorie, en pratique savoir ce que l’on veut vraiment, c’est savoir se remettre en question sur ce qu’on nous a transmis et et ce qu’on souhaite. Merci pr ces propos très pertinents 🙂

    • Merci pour ton commentaire 😉 Comme dans plein de domaines, il est clair que mettre en pratique est plus difficile que la théorie. Mais avoir conscience des choses et chercher à s’améliorer est toujours mieux que suivre ses œillères, je pense !

  2. Je crois qu’il est très difficile de mettre de côté ce que l’on a reçu et vécu. Mais faire la démarche d’essayer de dépasser tout cela est déjà un acte éducatif pour soi et pour son enfant. Le principal est d’en avoir conscience et de tenter de faire ‘au mieux’. Il n’y a pas d’éducation parfaite à mon sens. Il y aura tjs trop de ou pas assez de…mais tant que l’on est en accord avec soi-même et ce que l’on ressent dans le présent et pour le futur ça ira dans le bon sens 🙂

    • Bien d’accord globalement, si ce n’est le « il est très difficile de mettre de côté ce que l’on a reçu et vécu » : cela vaut pour l’éducation mais aussi pour d’autres situations problématiques que l’on a pu avoir à vivre. Et il ne s’agit pas de le mettre de côté, mais de « l’intégrer » : identifier quelles résonances cela a en nous, puis vient une phase d’intégration et de déconstruction de schémas qui nous semblent négatifs, puis de reconstruction d’une identité qui nous appartient mieux, avec laquelle on est plus en phase.

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